jigsaw – avec Le Fresnoy – Studio national – partage son coup de ❤️ du programme Le Fresnoy | Open Canal pour Le Songe de Lady Hamilton d’Olivier Cheval. Un choix guidé par son onirisme dont il fait preuve et les voyages immobiles auxquels il nous invite. Un voyage en Italie entièrement tourné à Paris, un rêve où les temps se brouillent et un hommage au début du romantisme par le prisme d’une histoire d’amour incomplète.
En 1786, Goethe s’est lancé dans un voyage de deux ans en Italie. Une expérience qui a laissé une impression énorme sur le grand génie romantique, et qui est devenue les notes du Voyage en Italie, adaptées ici pour l’écran sous une forme libre et imaginative. Goethe a été captivé par une certaine Lady Hamilton, et s’est confié à son ami Schiller. Son engouement s’exprime avec la même empathie passionnée qu’il utilise pour décrire l’éruption d’un volcan et les paysages italiens durant son voyage. Le jeune cinéaste Olivier Cheval a conservé la dévotion grandiose du texte captivant de Goethe dans son adaptation courte et précise, qui nous permet d’écouter les mots du poète pendant que les images les interprètent avec des paysages vertigineux et des reconstitutions performatives – le tout sur un glorieux film 16 mm et au format classique 4:3. Une grande imagination créative est en jeu dans un film qui, avec sincérité et ironie, équilibre la précision historique, l’ironie et les enregistrements en studio avec une artificialité théâtrale, presque muséale.
CPH:DOX Copenhagen International Documentary Film Festival
« Aucun ne me remuera plus les entrailles, car j’ai vu Rome moi aussi »
Extraits
Rome, le 18 novembre.Nous sommes retournés ce soir à la Chapelle Sixtine. [•••] À ce lieu se rattache toute l’histoire du monde, et je compte un second jour de naissance, une véritable renaissance, du jour où je suis arrivé à Rome.
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J’ai déjà vu bien des étrangers arriver et partir, et j’observais avec étonnement comme on peut voyager sans rien observer hors de soi. Dieu soit loué, aucun de ces oiseaux de passage ne m’en imposera plus à l’avenir lorsqu’il me parlera de Rome dans le Nord.Aucun ne me remuera plus les entrailles, car j’ai vu Rome moi aussi.
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Naples, le 6 mars.
Tischbein a surmonté sa répugnance en fidèle compagnon et il est monté avec moi sur le Vésuve aujourd’hui.Un artiste comme lui, qui ne s’occupe que des formes les plus belles, doit trouver abominable cet entassement informe qui se dévore lui-même sans cesse et déclare la guerre à tout sentiment du beau.
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Hamilton et sa belle Anglaise m’ont invité une dernière fois à dîner avant mon départ. Après le repas, Hamilton m’a conduit dans son cabinet secret d’œuvres d’art et de vieilleries. C’est une confusion complète. Des productions de toutes les époques sont mêlées au hasard : bustes, torses, vases, bronzes, bibelots en agate de Sicile, des peintures, des ciselures, et tout ce qu’il a pu acheter au hasard.
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Cet amateur d’art et de jeunes filles voulait que la belle créature fût plus encore qu’une statue vivante : il voulait en jouir comme d’un tableau changeant. Vêtue de diverses couleurs sur ce fond noir, elle imitait dans ce cadre d’or les tableaux antiques de Pompéi et même des chefs-d’œuvre modernes.
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Ah, Venise !Et Rome… Rome !
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Naples !Et la Sicile, la beauté de la Sicile !
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J’ai vu les plus belles peintures à Venise, les plus belles sculptures à Rome et les plus beaux tableaux vivants à Naples. Mais jamais je ne vis de gestes aussi animés, aussi nobles et émouvants que dans cette famille, à l’évocation du fils disparu.
Synopsis
En 1786, Goethe part en Italie, le pays dont il rêve depuis son enfance. Mais comment voir la beauté de son Arcadie ? Comment ne pas plisser les yeux devant l’intensité de la vie qui anime chaque chose là-bas, là où tout brûle, les gestes du peuple comme la forme des pierres, le fond des volcans comme l’étrange spectacle de poses de cette jeune courtisane, Lady Emma Hamilton ? Ce que Goethe n’a pas su voir, dire ou faire, il l’a écrit, revenu en Allemagne. Deux siècles plus tard, nous prenons l’avion pour Naples, le train pour le Vésuve, le ferry pour Stromboli. Nous partons en voyage.
Olivier Cheval
Le Songe de Lady Hamilton est une oeuvre produite par Le Fresnoy – Studio national et a été présentée dans le cadre de l’exposition Panorama 20, sous la direction artistique de José-Manuel Gonçalvès.
Le Fresnoy | Open Canal
🎥 Le Songe de Lady Hamilton à (re)découvrir dans le programme Open Canal du Fresnoy | Studio national : ICI
Le Fresnoy – Studio national a lancé, dans le cadre du confinement actuel, un nouveau programme : Le Fresnoy | Open Canal.
Open Canal présente chaque jour, à 10:00, une œuvre coup de coeur produite par le Fresnoy – Studio national, en accès libre.
Qui est Olivier Cheval ?
Né en 1988, Olivier Cheval est diplômé en 2015 des Beaux-Arts de Paris où il conçoit des installations vidéo autour de la vidéosurveillance, de l’imagerie de la guerre et de l’imaginaire de la terreur. Ancien élève de l’École Normale Supérieure de Lyon et docteur en esthétique du cinéma, il écrit aussi régulièrement sur le cinéma, les arts visuels et la littérature, notamment pour la revue Trafic. Il est également l’auteur du livre Le Partage de la douleur. Une impolitique du film, paru en novembre 2018 chez De L’Incidence Éditeur. Il réalise au Fresnoy – Studio national des arts contemporains en 2018 et 2019 ses deux premiers films, Le Songe de Lady Hamilton et Rose Minitel. Olivier Cheval a terminé son cursus au Fresnoy – Studio national des arts contemporains en 2019 – promotion Michelangelo Antonioni.