À travers l’installation Les liminaux Métamorphose de l’être en sa vision, présentée dès le 15 octobre au sein de l’exposition Panorama 22 – Les sentinelles, au Fresnoy – Studio national, Lucien Bitaux explore la portée du regard et les seuils de la perception, à la lisière du visible et de l’invisible. Les liminaux décrivent ce qui réside au seuil de la perception : visible, mais à peine ; invisible, mais saisissable.
La dimension liminale trouve sa métaphore dans l’œil, dans ce qui voit. Une photographie est l’addition d’une optique et du monde derrière elle ; l’optique fait apparaître le monde sans se montrer. Ce travail sur la perception et la relativité du regard tente de faire apparaître ce qui permet de voir, appelé ici les voyants. Un panel d’optiques dites entoptiques a été conçu : elles laissent des indices de leur présence dans les photographies. Il s’agit ensuite de faire des captures via ces voyants et de montrer le petit monde qu’ils proposent. Les liminaux étudient ainsi ce qui voit, ce qui regarde, afin d’expérimenter des voyants et des visibles. Ces nouveaux instruments de vision et les images qu’ils enregistrent construisent le doute du voyant face au réel. Quatre étapes structurent ce procédé de travail :
— approcher,
— rétrécir,
— montrer,
— raconter.
Nourrie par la phénoménologie de la perception, cette recherche fabrique des façons de voir et interroge le voyant-vu à la manière du sentant-senti. Plusieurs expériences de vision sont présentées, chacune correspondant à une approche du monde particulière : il s’agit parfois de sous-voir ou de sur-voir, dans une tension entre un réel précaire et un réel impérieux.
Qui est Lucien Bitaux ?
Diplômé en graphisme de l’EnsAD – École nationale supérieure des Arts Décoratifs de Paris, Lucien Bitaux y a fondé la Scoposcopie, une discipline visant à trouver de nouveaux moyens de représentation des dimensions imperceptibles (microscopiques et macroscopiques). Naïvement, il cherche indéfiniment d’autres façons de capturer, d’enregistrer et de montrer le réel. Cette démarche expérimentale s’appuie sur la fabrication de ses propres instruments. La photographie sous toutes ses formes, la captation par le biais d’optiques et la projection lumineuse incarnent ses médiums de prédilection.
Qu’est-ce que Panorama 22 – Les sentinelles ?
Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains présente en conclusion d’une année d’échanges, d’expériences, de recherche, plus de 50 œuvres inédites dans les domaines de l’image, du son et de la création numérique, imaginées et réalisées par les jeunes artistes et les artistes professeurs invités. De tous les événements de l’année, Panorama devrait être celui qui porte le plus authentiquement la signature Fresnoy – Studio national, résultat de sa mission première, articulant formation, production et diffusion.
Alain Fleischer, directeur du Fresnoy – Studio national
Panorama 22 est placé sous le thème des sentinelles, un mot qui désigne plusieurs significations dont l’une permet d’évoquer la figure de l’artiste, aujourd’hui, pour sa part de vigilance, de voyance, de veille, d’éveil. La sentinelle est à l’avant-garde, à l’avant-poste. De l’aube à la nuit, elle scrute l’horizon, se pose au bord ou de l’autre côté du corps, de la vie, de la mort, elle éclaire l’autre monde, l’autre côté de la frontière, l’outremonde. Les œuvres de Panorama 22 explorent le rapport entre le réel enrêvé et le rêve éveillé, entre le sol et le ciel, entre le monde observé et la vision hallucinée, entre les ténèbres et la lumière. Elles inventent des images de transit, dévoilent des ombres et des abysses, proposent des constellations et des souffles. Elles se tiennent juste là, devant nos yeux écarquillés.
Louise Déry, commissaire de Panorama 22 – Les sentinelles
🕒 15 octobre 2020 > 03 janvier 2021
Qui est Louise Déry, commissaire de Panorama 22 ?
Louise Déry vit à Montréal. Elle détient un doctorat en histoire de l’art et dirige la Galerie de l’UQAM (Université du Québec à Montréal) depuis 1997. Elle a été directrice du Musée régional de Rimouski, conservatrice au Musée national des beaux-arts du Québec et ensuite au Musée des beaux-arts de Montréal. Commissaire de nombreuses expositions d’artistes canadien·ne·s et de l’international présentées tant au Québec, au Canada, qu’en Europe, aux États-Unis, au Mexique et en Asie, notamment avec Giuseppe Penone, Sarkis, Nancy Spero, Antony Gormley, Dominique Blain, Aude Moreau, Françoise Sullivan, Artur Żmijewski et le philosophe Jean-Luc Nancy, elle a été commissaire du pavillon du Canada à la Biennale de Venise avec une exposition de David Altmejd (2007) et de Solo Snow. Œuvres de Michael Snow et À Montréal, quand l’image rôde, au Fresnoy – Studio national des arts contemporains. Elle fut la première lauréate, en 2007, du Prix de la Fondation Hnatyshyn pour l’excellence de son commissariat et elle recevait en 2015 le Prix du Gouverneur général du Canada. Membre de la Société royale du Canada, elle a été faite chevalier de l’ordre des Arts et des Lettres de France en 2016.