À quand remonte votre dernière danse ? La question pourrait paraître anodine. Etait-ce chez vous après la douche, dans un bar aux alentours de minuit ou encore dans une fête dans l’appart d’un ami d’ami ? Pour Nietzsche : Chaque journée non dansée était une journée perdue. Prenant le philosophe au mot, Nadia Vadori-Gauthier a commencé en 2015 à danser (au moins) une minute par jour.
Il s’agissait alors d’une réaction directe pour l’artiste et universitaire aux attentats de janvier. Si le projet est aujourd’hui documenté par un livre, un film et qu’une plateforme web archive toutes les vidéos de ces instants de danse, force est de constater qu’il n’a rien perdu de son actualité. En cette période de confinement, il se fait même plus viral que jamais fédérant une communauté autour d’un appel à partager sa danse quotidienne. Danser – non pas pour s’évader ou maintenir une activité physique – mais pour être ensemble et résister.
Danser, c’est résister
Dansant dans les manifestations, aux côtés de « gilets jaunes » et sur les places publiques, Nadia Vadori-Gauthier a souvent pu étonner et de nombreux médias ont relayé son initiative. On lui parle souvent des mêmes danses, peut-être les plus spectaculaires ou les plus contextuelles : elle affirme que ce ne sont pas les plus difficiles mais, au contraire, celles qui s’imposent à elle. Danser, c’est résister martelle en effet l’artiste (et notamment dans son livre du même nom, paru aux éditions Textuel) qui ne danse jamais au hasard mais arpente la ville et cherche le bon endroit, le bon lieu. En cinq ans, elle a très peu dansé chez elle, convaincu que c’était dans l’espace public qu’il fallait prendre parti, improviser, reprendre place. Les mouvements qu’elle exécute sont simples mais attirent l’attention ; ils peuvent ainsi être reproduit, repris. Si les passants marquent l’arrêt ou affichent la surprise quand il la voit, il n’est pas rare qu’ils la rejoignent.
Une action poétique au quotidien
Danser chaque jour – même une minute -, n’est pas aussi simple qu’il le paraît. Nadia Vadori Gauthier s’est ainsi imposée une discipline avec 14 règles pour délimiter l’accomplissement d’une action poétique quotidienne. La plus importante restant que chaque jour soit dansé, peu importe l’humeur ou la météo. Il faut, explique l’artiste, se rendre disponible et à l’écoute du monde jour après jour et quoi qu’il en coûte ; philosophique plus que physique cette démarche exerce l’attention. Habiter poétiquement le monde c’est ainsi se rendre poreux à son environnement, à son actualité… Alors, quand les mesures du confinement font du balcon : une nouvelle place publique et que, par crainte du coronavirus, le périmètre se restreint à un kilomètre autour de la maison, le projet évolue et chacun est appelé avec sa caméra et les moyens du bord à participer. Au même titre que les applaudissements, le rituel d’une danse quotidienne nous appelle ainsi à entrer en contact avec l’autre, à nous ancrer dans une action collective. Un non-solo collectif.
Qui est Nadia Vadori-Gauthier ?
Depuis janvier 2015, la chorégraphe Nadia Vadori-Gauthier mène un acte quotidien de résistance poétique : Une minute de danse par jour. Elle danse tous les jours, sans exception, quelles que soient l’humeur ou la météo. Pour l’époque, pour la Terre, pour notre temps. Aujourd’hui, après plus de 1900 danses, dans le contexte lié à l’épidémie de COVID-19 et au confinement, elle ouvre le projet à tou.te.s et invite à partager nos minutes précieuses de danse.